« VITE ! »
« Vite !, disait seulement celui des slogans écrits sur les murs qui fut peut-être le plus beau. »
GUY DEBORD, Le Commencement d’une époque.
« D’un côté, comme un caillou catatonique, corps aveugle et durci qui se pénètre de mort dès qu’il ôte ses lunettes ; d’un autre côté, brillant de mille feux, fourmillant de vies multiples dès qu’il regarde, agit, rit, pense, attaque.
Aussi s’appelle-t-il Pierre et Félix : puissances schizophréniques. »
GILLES DELEUZE, Trois Problèmes de groupe.
Convié à une séance de travail d’une compagnie théâtrale qui travaille à partir de ses textes dramatiques, le philosophe Pierre Félix s’endort dans une loge et se réveille au milieu de la nuit, prisonnier du théâtre.
Depuis les gradins, face à la scène désertée par ses acteurs, il entre-prend l’écriture d’une féérie clownesque sur le désir révolutionnaire, qu’il intitule VITE !…
Performance solo (créée à l’Université Paris VIII-St Denis, dans le cadre des journées internationales Félix Guattari, le 22 octobre 2022.), adaptée à toutes formes de lieux (théâtre, bibliothèque, salle banalisée…)
Enregistrement live, 2023.
Notre amitié intellectuelle et militante, née au théâtre en 1984 autour des récits de rêves de Franz Kafka, n’a malheureusement connu qu’une seule occurrence artistique et scénique, avec la lecture-performance de sa pièce Socrate (Théâtre Ouvert, Paris, 1988) — son décès inattendu ayant coupé court à nos projets d’écriture dramatique duelle.
Si les travaux philosophiques et les essais de l’auteur de La Révolution moléculaire et de Chaosmose — notamment ceux écrits avec Gilles Deleuze (L’Anti-Oedipe, Mille plateaux, Qu’est-ce que la philosophie ? …) — figurent en très bonne place dans les rayons de la bibliothèque philosophique du XXe siècle, son écriture dramatique — dont témoignent aujourd’hui une demi-douzaine de pièces composées à la fin des années 80 — est en revanche demeurée confidentielle.
« Ce théâtre comique, potache et d’inspiration dada, témoigne d’une posture existentielle que [Félix Guattari] n’a pas cessé de revendiquer : celle de ne jamais être là où on l’attend, de ne jamais habiter le centre des choses et d’explorer plutôt les périphéries et les marges. »
Flore Garcin-Marrou
« Ce n’est pas par une pratique exégétique que l’on peut espérer maintenir vivante la pensée d’un grand disparu, mais seulement par sa reprise et sa remise en acte, aux risques et périls de ceux qui s’y exposent, pour réouvrir son questionnement et pour lui apporter la chair de ses propres incertitudes. »
FÉLIX GUATTARI
J’ai composé ce polylogue pour voix seule en manière d’hommage amical et artistique à Félix Guattari (philosophe, psychanalyste, auteur d’une vingtaine d’ouvrages entre les années 70 et 1992.) Félix Guattari est décédé le 29 août 1992, à l’âge de 62 ans. La fiction de Vite ! se situe un an plus tôt, une nuit de septembre 1991.
(De G. à dr. : Félix Guattari, Michel Vinaver, Enzo Cormann, Roland Dubillard. Chez FG, rue de Condé, Paris, 1987.)