LE DÉSIR D’IMITATION

1990 |

Théâtre musical

Avec JM Padovani (saxophones)et Richard Camoralli (photographie en direct), Enzo Cormann (jeu).
CDN de Montluçon, Théâtre des Fédérés, mars 1990.

D’après « Le Désir d’imitation » de Hervé Guibert (in « Les Aventures singulières » – Éd. de Minuit, 1982).

« Gina a tout fait pour séduire le beau journaliste du Monde. Hervé raconte la scène du portrait : « Si vous voulez, je vais faire votre portrait free whithout charge. – C’est ça, dit Gina, vous devez être photogénique. » Hervé s’inspire de cette rencontre explosivepour écrire une de ses plus belles nouvelles, «Le Désir d’imitation », publié dans Les Aventures singulières en 1982 : un jeune homme retrouve une femme plus âgée, une ancienne vedette de cinéma entre luxe et raffinement extrême. « Sa chambre se situait au premier étage : tous les couloirs, bordés de placards, renfermaient les robes de ses films et de ses soirées, qu’elle avait toutes gardées… »
Après une visite de la maison et un dîner en tête à tête, « nous allâmes ensemble dans le sous-sol, et elle ouvrit le grand frigidaire qui contenait les bobines de ses films. Elle m’en fit choisir deux, Mes nuits de Chine et le Grand Saba ». Mais chez Hervé l’admiration laisse invinciblement place à la panique, à l’effroi face au naufrage de la vieillesse. « Cette femme qui a dû être “la plus belle du monde” n’est plus qu’une ombre effrayante. »
Après l’amour et l’affection, on passe aux gestes du crime et aux envies de meurtre. Le tête-à-tête au champagne tourne au film d’horreur. La séparation évite le massacre, et les retrouvailles à New York n’en sont que plus émouvantes. Assaillie par ses admirateurs, la star doit son salut aux « flics »… Hervé écrit : « Un instant merveilleux venait de se passer : être à New York, la nuit, dans une voiture de police, avec cette femme presque divine à mes côtés. » Rêve ou réalité, personne n’a envie de le savoir. Beaucoup de témoins nous ont rapporté l’admiration de Gina Lollobrigida pour Hervé. Même le meilleur des paparazzi n’y a rien compris ! Il ne nous reste qu’un indice : la dernière phrase de la nouvelle écrite par Hervé : «Elle me dit : “dans cette impossibilité d’amour, il y aura quand même eu un peu d’amour”… « 

François Buot, « Hervé Guibert », Grasset, 1999.